En dignes Glouton, nous avons écumé marchés et cantines de bord de route pour goûter à tous les plats typiques du coin. C’est bon, c’est comme ça qu’on mange ici, et c’est vrai que question budget, ça nous arrange, on se régale pour 2 € ou moins.
Mais quitte à faire un vrai tour d’horizon de ce qu’on propose en Thaïlande, pourquoi pas se faire un vrai bon resto, un truc contemporain, différent, recherché, avec un vrai chef aux platines, un service, bref une vraie table ?
On voit parfois des cartes qui proposent des plats plus chers et on tourne les talons, mais si pour une fois on essayait ?
Allez, c’est parti, on est à Chiang Mai, grande ville, on devrait trouver de quoi craquer un peu.
On cherche un cadre sympa, on a un budget de 20 € chacun sans les vins, en se disant que pour la Thaïlande c’est déjà pas mal vu les prix moyens (de 2 à 5 €).
Et dans l’assiette, on espère un peu d’authenticité cuisinée avec des techniques contemporaines, et pourquoi pas un subtil mélange des saveurs exotiques et occidentales.
On commence par déambuler dans les rues. Si Chiang Mai a son lot de quartiers backpackers avec les petits resto pas chers, il y a aussi des quartiers plus chics, beaux hôtels et beaux resto. On peut peut-être trouver notre bonheur dans le coin.
A première vue, la réponse est non ! Les restos Français, Italiens ou autres ont l’air de sortir tout le meilleur de leur terroir, mais ce n’est évidemment pas ce qu’on cherche ici.
Et pour les resto Thaï un peu classieux, c’est juste l’arnaque ! Sous prétexte que la terrasse est belle et que pour une fois la vaisselle est jolie, on nous ferait payer 3 ou 4 fois le prix pour les plats les plus courants ? Non, sérieusement les mamies les font aussi bien sur le trottoir, on ne se fera pas avoir…
N’ayant rien trouvé de convainquant, on s’aide d’internet.
Mais là encore, rien n’attire nos papilles.
Décidément, il ne semble pas y avoir de Chef renommé dans cette ville, rien d’original qui mérite de faire craquer le porte-monnaie.
Et là, au hasard de nos balades, on tombe sur The Deck.
Resto à l’architecture moderne au bord de la rivière Ping, à l’Est du centre-ville.
Tout le monde en costard, les tables sont belles et le menu fait envie.
Là, le Pad Thaï semble revisité. Emulsions de mangue par ci, croquants aux noix de cajou par là, et une vraie mise en scène de l’assiette.
Allez, c’est parti, on réserve, on se fait beau (pas dur) et on y va !
Ca commence super bien. Accueil délicat et chaleureux, on nous installe au bord de l’eau sous les arbres joliment éclairés de lampions, à une grande table nappée de blanc, fauteuils avec coussins, on va être bien.
On commande un vin blanc Chilien. Bien que dans le centre-est du pays il y ait quelques vignes, le vin Thaï n’a pas encore fait ses preuves alors que le Chilien est vraiment bon (surtout quand ça fait 2 mois qu’on tourne à la bière…).
On sent déjà que le service,c’est pas comme à la maison : on ne fait pas goûter le vin, les gestes ne sont pas très adroits, malgré bien des efforts ! Ca nous fait sourire.
Au menu, 2 entrées poisson (saumon) et crabe.
On continuera ensuite sur un bar sauce mangue et maïs, et purée de céleris pomme de terre, et sur une poulet émincé mélangé aux épices locales, enroulé dans une pâte aux oeufs, et riz.
Les entrées arrivent super vite.
C’était délicieux, le crabe un peu pané croquait sous la dent, le bon goût relevé par la coriandre et la fraîcheur de la salade accompagnant se mariait parfaitement.
Seul bémol : le plat d’Alex était vraiment très épicé, et quand on ne s’y attend pas, on profite moins, et surtout le piment prend le dessus sur la fraîcheur du poisson, pourtant frais et pas gras du tout…
Là, ils ont un peu merdé, déjà ils auraient pu lui demander s’il aimait manger corcé (ils l’ont fait pour mon plat principal) et quand bien même, autant de piment n’était pas adapté à ce plat.
Allez, c’est pas grave on en profite quand même, le vin blanc nous monte à la tête, allons fumer une cigarette sur le quai avant de continuer.
Par précaution, on prévient la serveuse qu’il nous faut 10 minutes.
Faute de compréhension ou je ne sais quoi, en revenant, les assiettes étaient déjà là !
Un doigt sur la vaisselle, et on comprend que c’est froid, alors on renvoit en cuisine, on avait prévenu.
Tout en sourire, on nous ramène nos plats quelques minutes après, et on peut commencer à déguster.
C’est plein de couleurs, le plat d’Alex est tout en superpositions, bref y’a un peu de boulot, de recherche et de soucis de faire bien.
C’est beau, c’est bon, on se régale. L’exotisme du sucré-salé s’allie au croquant du maïs pour le plat de poisson, la finesse de l’émincé de poulet est délicat et plein d’épices : coriandre, ail, citron vert, pousses de bambou, piment…
Seule petite critique : il manque peut-être un peu de légèreté. Le dôme de riz dans sa feuille de bananier est certes joliment amené, mais il y en a trop. De même pour le bar, 300 g de poisson et une purée, comment terminer sur un dessert après cela ?
D’ailleurs, les desserts ne donnent pas dans l’exotisme. Fraisier ou glaces, il n’y a rien de transcendant.
Pour le bilan ? C’était différent de ce que l’on imaginait.
On a passé un très bon moment, assouvi nos curiosités, le cadre était splendide, les efforts de service notables, la cuisine plus raffinée qu’ailleurs… Mais il reste une belle marge de manoeuvre pour confirmer les idées culinaires, affiner les recettes et faire de cette adresse un panaché d’authenticité revisitée.